Dialogue avec mon psy...Episode 2
Me voilà donc de retour chez mon psy à moi.
Ambiance Cosy : pelotonnée dans un fauteuil hypra-moelleux, un mug de chocolat fumant à la main, un chat non allergisant ronronnant près de moi… Cette fois-ci, un feu de cheminée crépite doucement dans un coin de la pièce…
Sourire craquant aux lèvres, mon psy m'encourage…
"- Alors, comment allez-vous aujourd'hui, ma très chère patiente préférée?"
(Ok, syntaxiquement, il est un peu lourd, mais je suis magnanime, je pardonne)
(- Grand soupir -)
(- Suivi de ses petits frères empressés –)
- A ce point ? S’inquiète-t-il sincèrement
(Le reste de la famille se précipite.)
- Hum hum…Nous en étions, il me semble, à votre gestion du temps et à votre organisation personnelle murmure-t-il de sa voix grave…. donc je vous en prie, continuez … Quitte à vous créer un planning de folie, avez-vous essayé de vous trouver un moment pour vous ?
- bien sûr !! J'ai expérimenté la relaxation ! Bon, ok, j'avais l'impression d'être bouddha au royaume des angoissés. Au bout de 5 min, je me suis endormie sur le carrelage.Au final, j'ai renoncé: c'était trop flippant tous ces stressés qui me mitraillaient du regard dès que je battais trop lentement des paupières… Alors, j'ai décidé de faire du tai chi; cela faisait des années que je voulais en faire. Grosse déception... ça me demande une concentration phénoménale pour relâcher mes muscles au lieu de les crisper, pour caresser l'air au lieu de le fouetter, pour effleurer l'autre au lieu de lui coller une patate entre les deux yeux
- Intéressant comme vision d'un art martial zen…
Grrrr …
Là, le chat ne ronronne plus, il est cramponné à l'accoudoir tandis que je lui masse profondément les vertèbres…
- Je me trompe peut-être mais j'ai l'impression qu'il y a d'autres tensions non ?
- peut-être…
- au travail ?
Là, Minou s'est carrément planqué sous les coussins
- comment vous dire? Je crois que je pourrais écrire un traité sur l'importance du nombril d'autrui dans ma vie. Je ne fais que ça. En ce moment, parfois l’impression de ménager une ménagerie : de jeunes coqs, de vieux boucs, des paresseux, des pies. Et on attend de moi que je reste modérée et imperturbable !
- Allez, racontez-moi. Que s’est-il passé réellement ?
- Rien de grave dans l’absolu. Juste un jeune coq, que dis-je un petit poulet d’1m60 qui s’est permis de m’expliquer comment faire mon travail et qui est allé tout rapporter à Papa Patron quand il a senti l’ambiance s’électriser.
- Ce n’est pas nouveau, si ?
- non mais je sature. J’ai parfois la sensation de travailler dans un laboratoire psychiatrique expérimental : des égos surdimensionnés ou carrément bancals, des caractériels, des autistes. Et on attend de moi que je sois le Dalaï Lama professionnel. Je dois faire le dos rond, ne pas faire de vagues. Bref, je suis une grosse chose molle au milieu du torrent
- personnellement, je n’ai jamais vu de grosse chose molle aussi charmante.
- Hum je sais pas trop comment le prendre ça…
- Et ce jeune homme, a-t-il touché un point sensible ? Y avait-il un fond de vérité dans tous ses propos?
- alors premièrement, on ne parle pas de propos, il n’a pas l’âge mental pour ça. Et enfin, vous m’excuserez, mais j'ai du mal à prendre au sérieux un gamin dont le nez affleure tout juste le niveau des plus longs poils de mes aisselles et qui semble s'épanouir en parcourant les couloirs tout en criant "suce mon doigt" !
- Seriez-vous rancunière, chère Muriel ?
- Aucunement. Vengeresse serait plus exact…
- La différence doit être subtile…
- Certes. La rancunière ressasse indéfiniment son amertume sans jamais connaître d’apaisement. La vengeresse elle, se sent libérée de sa colère le jour où elle met un coup de pied magistral (de préférence avec des santiags aiguisées) au cul du petit voyou.
- Vous êtes bien consciente que vous ne le ferez pas? Que vous n'irez jamais jusque ces extrémités …sans jeu de mot bien sûr (Ce qu'il est drôle en plus mon psy !)
- Non. Bien sûr… Quoique ! Mais vous savez, savoir que je pourrais, en un éclair, basculer du côté obscur des ressources humaines et me laisser aller à ma bestialité me fait déjà du bien. Surtout quand je vois déambuler son popotin rebondi devant moi….
- alors en fait quelle solution vous reste-t-il ? me demande mon sexy-psy tout doucement
Je réfléchis intensément : je n’ai pas encore acheté mes santiags et personnellement, je trouve ça assez moche. Je ne me vois pas non plus poursuivre les salariés la jambe en l’air, ni me lancer dans la fabrication artisanale de camisoles de force aux couleurs de l’entreprise… Mes compétences en kung-fu se résument au visionnage de quelques films de Bruce Lee, contrainte et forcée, à l'âge de 8 ans…
Je pose ma tasse, attrape un flacon d’huile de massage et tend mes pieds en face de moi. Bien sûr, on sait tous qu'un psy ne ferait pas ça. Mais mon psy à moi, il est différent. Il croit tout comme moi, à la calinothérapie, la seule thérapie réellement efficace pour les grosses choses molles en attente de vengeance libératrice…